Le télétravail par choix et par obligation

Le télétravail par choix et par obligation

Peu fréquent dans le réseau de la santé et des services sociaux, le télétravail est devenu subitement, avec les bouleversements découlant de la pandémie, un mode répandu d’organisation du travail et, conséquemment, un sujet d’analyse et d’intervention pour les syndicats ainsi que de préoccupations pour leurs membres. Bleu APTS en fait l’examen en quatre articles. Voici le premier.

Notons d’emblée qu’il n’y a actuellement pas de définition formelle du télétravail dans les conventions collectives et que les syndicats entendent y remédier. Nous n’en retrouvons pas non plus dans la législation québécoise relative au monde du travail. Le ministre du Travail a annoncé à l’automne 2020 qu’il prévoit l’adapter à la nouvelle réalité du télétravail.

Répondons d’abord à deux questions qui nous sont fréquemment posées.

Une demande de télétravail peut-elle être refusée?

Le télétravail est basé sur un accord mutuel entre l’employeur et la personne salariée. Si la convention collective ne contient aucune disposition à cet effet, l’employeur peut refuser la demande de télétravail d’un·e salarié·e. Bien que certaines ententes locales prévoient des modalités rattachées au télétravail, ce n’est pas le cas dans la plupart des conventions collectives applicables dans le réseau de la santé et des services sociaux (RSSS). L’APTS prépare un chantier de travail afin de faire évoluer la situation.

Car de plus en plus d’études démontrent les effets positifs d’une organisation du travail à distance. Dans bien des cas, les deux parties gagnent à la favoriser, sans parler de ses impacts positifs sur la congestion routière et l’environnement. D’ailleurs un sondage de la firme KPMG réalisé durant l’été 2020 révélait que près de 6 Québécois·es sur 10 (59 %) estiment leur productivité meilleure en télétravail.

Si l’employeur peut refuser le télétravail, il doit tout de même évaluer toute demande en ce sens. Son évaluation doit être raisonnable, équitable et ne pas être arbitraire. Il doit être en mesure de motiver son refus en s’appuyant sur des critères comme :

  • la nature des tâches et des fonctions;
  • l’incompatibilité avec les exigences du travail;
  • la difficulté ou l’incapacité du ou de la salarié·e à télétravailler;
  • les impératifs de sécurité et de confidentialité.

Alors que les employeurs ont intérêt à clarifier les critères d’éligibilité et les modalités d’acceptation du télétravail, les personnes salariées, elles, doivent persister dans leur demande de réorganisation de leur travail en mode à distance.

L’employeur peut-il imposer le télétravail?

Exiger que vous travailliez à partir de votre domicile sans votre consentement serait une intrusion non justifiée dans votre vie privée et une atteinte à la jouissance paisible de vos biens. L’employeur ne peut donc pas imposer le télétravail.

Le télétravail est possible uniquement après une entente entre les parties. Cependant, en cas de force majeure ou de situation exceptionnelle (risque épidémique, catastrophe naturelle, etc.), l’employeur peut imposer temporairement le télétravail. Cette exception n’est valable que dans le but d’assurer la santé et la sécurité des personnes salariées et/ou de répondre aux exigences de la Loi sur la sécurité publique comme c’est le cas avec la COVID-19.

Lorsque l’état d’urgence de santé publique sera levé, l’employeur devra décider s’il revient aux modes traditionnels d’organisation du travail en cessant le recours au télétravail. Il pourrait également décider d’évaluer les possibilités de maintenir les ententes de télétravail ou d’implanter des modes hybrides. Si vous souhaitez maintenir votre télétravail à la suite de la pandémie, discutez-en avec votre gestionnaire et votre syndicat.

À lire aussi : «Le télétravail : à quelles conditions? – 1ère partie» et  «Le télétravail : à quelles conditions? – 2partie»

Rédaction Pierre Collin | illustration Alain Reno | 4 juin 2021