Après la pandémie, l’austérité?

Après la pandémie, l’austérité?

Quel bilan de fin d’année tirer de l’évolution de la conjoncture politique et économique québécoise pour notre action syndicale? Avec le confinement et la crise économique qui en a découlé, il va sans dire que le contexte s’est détérioré. Le Québec est passé d’une situation où le gouvernement enregistrait des surplus budgétaires inédits à un retour des déficits.

Malgré les engagements pour l’année en cours et la suivante, il est déjà assez clair que le ministre des Finances a l’intention de replonger le Québec dans l’austérité dès 2022.

Que faire alors?

Devrons-nous encaisser les compressions à venir? Devons-nous adhérer au discours de rigueur, qui présente les finances de l’État comme une catastrophe? Devons-nous mettre au rancart nos revendications et demandes pour améliorer nos conditions de travail et la qualité des services offerts à la population?

La réponse à ces questions est simple : non.

Des finances publiques viables

À la mi-novembre le Directeur parlementaire du budget (DPB), un organisme fédéral indépendant chargé d’évaluer les politiques budgétaires, indiquait que le Québec était la province avec le meilleur bilan financier du Canada. Mieux encore, le DPB conclut non seulement à la viabilité de nos finances publiques, mais aussi à la possibilité de rehausser d’un peu plus de 5 G $ nos dépenses de programmes sans mettre à mal cette viabilité.

Quand vient le temps de juger de cette viabilité, la situation peu reluisante des finances actuelles ne doit pas nous faire oublier les perspectives à moyen et à long terme. Que notre dette publique augmente n’indique pas nécessairement que l’État doit se serrer la ceinture. Pour se faire une idée de l’état des lieux, il convient de regarder deux indicateurs : le poids de la dette dans l’économie (ratio dette/PIB) et la part du service de la dette (le coût lié aux paiements d’intérêts sur les emprunts gouvernementaux) par rapport aux revenus du gouvernement.

Dans ces deux cas, il est vrai que la situation s’est détériorée cette année, ce qui, avouons-le, n’est pas surprenant quand on considère le contexte de récession.

Or, ce dernier est passager et les projections pour les prochaines années indiquent que ces deux indicateurs demeurent en bonne posture. Le poids de la dette par rapport au PIB est non seulement plus bas que son niveau d’il y a tout juste cinq ans, malgré la crise, mais les projections pour l’horizon 2030 montrent une reprise rapide d’une tendance à la baisse.

Ceci indique que la capacité de la société québécoise à prendre en charge sa dette s’améliorera durant les prochaines années.


Le même constat peut être fait quand on s’intéresse à la part du service de la dette dans les revenus gouvernementaux. Actuellement à 7 %, cette part est déjà deux fois plus basse qu’au tournant des années 2000 et pourrait descendre jusqu’à 5,5 % dans les dix prochaines années.

Quelques idées pour se sortir de l’impasse

Non seulement les finances publiques résistent bien à la pandémie, mais il serait possible de revoir à la hausse les revenus du gouvernement afin d’augmenter notre capacité collective d’action. Puisque la dette est sous contrôle, pourquoi ne pas suspendre les versements au Fonds des générations et ainsi économiser 2,6 G $ dès cette année? Pourquoi ne pas revoir la rémunération du corps médical comme l’avait promis la CAQ lors des élections? Pourquoi ne pas lutter contre les paradis fiscaux et rapatrier environ 2 G $ seulement en impôt des particuliers? Pourquoi ne pas suivre les propositions de la coalition Main rouge et mettre en place des alternatives fiscales pouvant rapporter 10 G $ au trésor public?

Sans aller de l’avant avec toutes ces propositions, il nous semble évident que leur application, même partielle, est une meilleure avenue que le retour annoncé de l’austérité.

Rédaction  Philippe Hurteau  | 17 décembre 2020