Changer le mode de scrutin pour marquer l’histoire

Changer le mode de scrutin pour marquer l’histoire

L’APTS appuie la campagne du Mouvement Démocratie Nouvelle (MDN) pour inciter le gouvernement à respecter sa promesse de réformer le mode de scrutin. Nous avons demandé à la responsable politique de l’action féministe de l’APTS de nous présenter la perspective féministe qui inspire cet appui.

BleuAPTS : Pourquoi la réforme du mode de scrutin est-elle importante?

Marie-Claude Raynault : La réforme du mode de scrutin est une occasion à saisir d’atteindre la parité pour les femmes au sein de l’Assemblée nationale et de s’assurer de la maintenir. C’est tout le Québec qui y gagnera parce que le déficit de représentation des femmes a un impact sur les décisions qui sont prises. La présence d’une proportion élevée de femmes dans la députation contribue à l’adoption de politiques sociales qui profitent à tous et à toutes.

L’Assemblée nationale compte à l’heure actuelle une proportion record de femmes. En quoi la réforme du mode de scrutin est-elle nécessaire pour atteindre l’objectif de parité?

L’Assemblée nationale est effectivement plus proche de la parité qu’elle ne l’a jamais été, avec 42 % de femmes, un résultat qui s’éloigne enfin du seuil maximal historique de 30 % des dernières décennies. Même lorsque les femmes ont brièvement constitué 44 % du Conseil des ministres en 2007, elles ne représentaient que 28,8 % de l’ensemble des député·e·s. Ces chiffres l’illustrent : on ne peut pas compter sur la seule bonne volonté des partis pour proposer davantage de candidates. Il faut imposer des contraintes concrètes et vérifiables par voie législative pour atteindre la parité de manière stable et ne pas être à la merci de la volonté parfois volatile des partis d’une élection à l’autre.

Le nouveau mode de scrutin pourra-t-il contribuer à la parité hommes/femmes?

Certainement. L’adoption d’un système électoral proportionnel mixte compensatoire permettra de concilier nos objectifs démocratiques, féministes et antiracistes parce qu’il fait en sorte que chaque vote compte.

Concrètement, par quels mécanismes ce système assurera-t-il qu’il n’y aura plus de recul possible pour les femmes?

Les partis devraient présenter des listes fermées dont la moitié débuterait avec une femme et l’autre moitié avec un homme, ainsi que des sièges de circonscription paritaires composés de femmes et d’hommes dans une proportion entre 45 % et 55 %. Et le Directeur général des élections devrait pouvoir exiger la conformité aux règles de parité pour les sièges de liste et de circonscription.

Par quelles actions l’APTS manifeste-t-elle son appui à la campagne en faveur de la réforme du mode de scrutin?

L’APTS a participé le 26 mai dernier à une conférence de presse, organisée par le MDN et le Groupe Femmes, Politique et Démocratie (GFPD), pour rendre publique une déclaration. Signée par une large coalition d’organismes, elle exige du gouvernement que l’atteinte de la parité soit un objectif du système électoral québécois et précise un certain nombre d’attentes, dont la prise en compte de la diversité.

À cette occasion, nous avons rappelé au premier ministre ses promesses de réformer le mode de scrutin pour une meilleure représentation des femmes au parlement. Le GFPD a formulé les recommandations précises mentionnées plus haut pour que la réforme serve notre objectif de parité. On y tient. Même si le caucus est divisé sur la question, nous réclamons le dépôt d’un projet de loi sur ce sujet, tel que promis, à l’automne 2019.

L’appui de l’APTS à cet enjeu est directement lié à ses propres efforts pour que la composition de ses instances décisionnelles reflète celle de son effectif, à 86 % féminin. Pour en savoir plus, consultez L’équité représentative à l’APTS.


Quelle est la position des autres partis face à cette réforme?

En principe, ils y sont tous favorables. Les chefs et porte-paroles du Parti québécois, de la Coalition avenir Québec, de Québec solidaire et du Parti vert du Québec ont signé le 9 mai 2018 une entente pour réformer le mode de scrutin afin de mettre en place un système à finalité proportionnelle au Québec. Les quatre partis s’engageaient à agir ensemble pour mettre en place un scrutin proportionnel mixte compensatoire avec listes régionales. Puisqu’il était assuré qu’un des partis politiques signataires allait former le prochain gouvernement, cette entente prévoyait qu’un projet de loi prônant cette orientation soit déposé au plus tard le 1er octobre 2019.

Rappelons que cette entente faisait suite à la vaste consultation citoyenne menée par le MDN à l’automne 2017. Des forums citoyens, auxquels ont participé des représentant·e·s de tous les partis, avaient alors été organisés dans plusieurs régions du Québec, soit à Montréal, Saguenay, Gatineau, Rimouski, Trois-Rivières et Québec. Un rapport détaillé a par la suite été rédigé, qui explique bien tous les tenants et les aboutissants.

D’ailleurs, je conseille à ceux et celles qui s’intéressent à cet enjeu de consulter le site Chaque voix compte.com, qui contient plusieurs outils de vulgarisation du système électoral à finalité proportionnelle.

Propos recueillis par Chantal Mantha | 21 juin 2019